L'Europe, de la construction européenne à la réunification 1945 – 2007

L’idée européenne est ancienne mais les tentatives engagées au fil des temps ont échoué ; il est vrai qu’elles reposaient sur un fondement impérial et guerrier : ce fut le cas de l’Empire romain, de l’Empire carolingien, de l’Empire napoléonien, des conquêtes hitlériennes.

L’unification de l’Europe ne commença vraiment qu’après la seconde guerre mondiale, lentement, progressivement, et aujourd’hui encore elle reste partielle ; c’est pourtant un phénomène sans précédent ! Non seulement c’est la première fois qu’un tel processus s’effectue par la négociation et dans la paix, sans la moindre violence et sans la moindre contrainte, mais c’est aussi un processus qui garantit davantage la paix en Europe, et c’est sans doute là la principale réalisation de l’Europe, ce que l’on oublie bien souvent…

La construction européenne est certes lente et imparfaite à l’heure qu’il est mais il s’agit en fait d’un véritable défi qui s’inscrit dans la longue durée, dans le temps long. Depuis 50 ans des progrès considérables ont été faits. Il en faudra peut-être encore 50 pour aboutir, et les historiens d’alors diront peut-être que cette construction exemplaire s’est effectuée finalement rapidement : en un peu moins d’un siècle…

• La construction européenne s’est d’abord effectuée en Europe Occidentale dans un contexte de guerre froide. Le tournant de 1989-91, avec l’effondrement du communisme et la souveraineté retrouvée pour les pays d’Europe centrale et orientale change fondamentalement les données de la construction européenne : l’Europe se réunifie et se trouve confrontée au défi de l’élargissement et de l’approfondissement simultané, en quelque sorte condamnée à réussir pour maintenir son rang au XXIème siècle face aux deux géants appelés à le dominer : les EUA et la Chine.

 

I. LES PREMIERS PAS DE L’APRES-GUERRE

Une idée déjà ancienne que l’on trouve par exemple chez Victor Hugo, un précurseur:

« Un jour viendra où les armes vous tomberont des mains à vous aussi 1 Un jour viendra où la guerre vous paraîtra aussi absurde et aussi impossible entre Paris et Londres, entre Petersbourg et Berlin, entre Vienne et Turin, qu’elle serait impossible et paraîtrait absurde aujourd’hui entre Rouen et Amiens, entre Boston et Philadelphie. Un jour viendra où vous France, vous Russie, vous Italie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous toutes nations du continent, sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure, et vous constituerez la fraternité européenne, absolument comme la Normandie, la Bretagne, la Bourgogne, la Lorraine, l’Alsace, toutes nos provinces se sont fondues dans la France. Un jour viendra où il n’y aura plus d’autres champs de bataille que les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits s’ouvrant aux idées. Un jour viendra où les boulets et les bombes seront remplacés par les votes, par le suffrage universel des peuples, par le véritable arbitrage d’un grand sénat souverain qui sera à l’Europe ce que le Parlement est à l’Angleterre, ce que la Diète est à l’Allemagne, ce que l’Assemblée législative est à la France. »

Victor Hugo, Discours inaugural du congrès de la Paix, Paris, 21 août 1849.

Proposition d’Aristide Briand  durant l’entre deux guerres, qui échoue du fait de l’hostilité de la Grande-Bretagne et de la montée en puissance des fascismes et du nationalisme

 

A. Le contexte de la construction européenne

1°) Le contexte de l’après-guerre

a) La prise de conscience d’un modèle spécifiquement européen

– Un modèle de civilisation fondée sur un riche héritage culturel qui remonte à l’Antiquité et s’appuie sur les valeurs des Lumières, la raison, la tolérance et la souveraineté populaires

– Un modèle fondé sur la démocratie libérale (régime parlementaire, garantie des libertés et droits de l’homme),  et sur un libéralisme économique tempéré par la nécessaire intervention de l’Etat-Providence

b) La prise de conscience de la fragilité de l’Europe

– L’écoeurement des guerres fratricides entre Européens,

– L’immense faiblesse de l’Europe en fait un enjeu face aux deux supergrands et le risque d’effacement est grand

– Seule l’union peut encore permettre de conserver une existence sur la scène internationale : la construction européenne, c’est aussi une véritable communauté d’intérêts à défendre et à promouvoir.

c) Une triple crainte à l’origine de l’Europe

– Crainte face à la puissance de l’URSS et à son expansionnisme en Europe de l’Est ralliée de force au modèle de la démocratie populaire

– Crainte face à l’hégémonie US toute puissante en matière économique et financière

– Crainte d’une résurrection incontrôlée de la puissance et du militarisme allemands

2°) Les moteurs de la construction européenne

a) Les partisans de la construction européenne et leurs adversaires

– Le courant démocrate chrétien, bien représenté en Allemagne (Adenauer et la CDU), en Italie (De Gasperi et la DC) et en France (Robert Schuman et le MRP), joue un rôle de premier plan.

– La social-démocratie se rallie aussi à l’idée européenne (partis socialistes modérés)

– Les freins à la construction

  • Ils viennent des forces qui entendent préserver la souveraineté nationale au maximum et qui soutiennent uniquement la mise en place d’une « Europe des Etats » ou « Europe des Nations » refusant toute perspective fédérale
  • C’est le cas de la Grande-Bretagne ou de la France gaulliste, ou encore de courants nationalistes de l’opinion

b) Le couple franco-allemand

– Il revêt une importance particulière car l’Europe ne saurait se construire sans que ne s’effacent les vieilles haines entre les deux pays.

– Différents binômes de chefs d’état français et de chanceliers allemands vont jouer un rôle fondamental dans le rapprochement franco-allemand, pierre angulaire de la construction européenne, et ce au-delà de leurs divergences au plan politique générale (gauche/droite)

  • De Gaulle et Adenauer
  • Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt
  • François Mitterrand et Helmut Kohl

B. Le succès des premières initiatives

1°) Le coup de pouce américain et l’atlantisme

a) La création de l’OECE

– OECE = Organisation Européenne de Coopération Economique

– création le 16 Avril 48

– Organisme de gestion de l’aide qui rassemble les bénéficiaires du plan Marshall en vue de la répartition par les européens eux mêmes de l’aide Marshall (12 Milliards de $ fournis en 4 ans aux 16 pays d’Europe occidentale qui l’acceptent)

 

b) Le Pacte atlantique et l’OTAN

1. Le traité de Bruxelles
  • Alliance défensive signée entre la France la GB, le Benelux en mars 1948 suite au coup de Prague qui fait basculer la Tchécoslovaquie à l’Est
  • Insuffisant pour assurer la sécurité européenne face à l’URSS
  • Les Européens demandent donc l’appui américain pour assurer la sécurité européenne (« parapluie américain »)
  • Traité d’alliance défensive entre les pays des deux rives de l’Atlantique Nord : tout pays agressé recevra donc le soutien des autres
  • Il rassemble
2. Signature du traité de l’Atlantique Nord  (4 avril 1949)

• Les EUA, le Canada et l’Islande

• La Norvège, le Danemark, la GB, le Benelux, la France, l’Italie, le Portugal

3. l’O.T.A.N. : 1950
  • « Organisation du Traité de l’Atlantique Nord » : c’est l’expression militaire du Pacte Atlantique
  • Organisation stratégique intégrant les forces militaires des états membres de l’alliance atlantique sous un commandement unique

Remarque :

Les Etats d’Europe de l’Ouest s’appuient sur les Etats-Unis : l’atlantisme est né, qui souhaite associer étroitement l’Europe aux EUA.

 

2°) Les initiatives européennes

a) La création du Benelux

= Union douanière Belgique, Pays Bas, Luxembourg en 1948

b) Le Conseil de l’Europe

Congrès de La Haye sous l’impulsion de Churchill en Mai 48

– 800 délégués de 19 pays favorables à une Europe unie

– Appel à la constitution d’Etats-Unis d’Europe

Mai 49 : création du Conseil de l’Europe

– Les membres

  • 10 pays  occidentaux à l’origine suite à l’appel de Churchill
  • Extension rapide à 21 membres soit la totalité des Etats d’Europe occidentale

– Institutions :

  • Un conseil des ministres représentant  les gouvernements
  • Une Assemblée consultative dont le siège est à Strasbourg

– Rôle :

  • Défense de la démocratie,
  • Coopération dans les domaines juridique et culturel

c)  La réussite de la CECA

1. Une initiative française

– Elle est le fait de deux précurseurs Jean MONNET initiateur du premier plan français et Robert SCHUMAN ministre des affaires étrangères de l’époque

– 9 Mai 1950 : proposition de communauté franco allemande pour le charbon et l’acier, ouverte aux autres pays européens.

  • L’acier, produit avec lequel on a fait la guerre
  • Le charbon, produit de base de la reconstruction

– Dans l’esprit de ces hommes il ne fallait pas isoler à nouveau l’Allemagne, mais au contraire l’associer à un projet commun et créer des solidarités de fait entre les pays européens : des peuples et des états qui travaillent ensemble ne se font pas la guerre. Cinq ans seulement après la fin de la guerre  et alors que les plaies qu’elle a ouvertes sont toujours douloureuses, il fallait un certain courage politique et surtout beaucoup de lucidité pour dépasser la passion et pour aller dans cette voie.

2. La CECA.

– Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier : un pouvoir supranational sans précédent

– Fondation au traité de Paris 18 Avril 1951

– Entrée en application le 25 Juillet 1952

– 6 pays fondateurs (« Europe des 6 ») France, Allemagne, Italie et les 3 du Benelux.

  • Hostilité britannique
  • Condamnation soviétique

– Président de la Haute Autorité : J. Monnet

– Fonctions :

  • coordination et harmonisation des Productions de fer, charbon et acier entre pays membres
  • active politique sociale notamment pour le reclassement des ouvriers touchés par le déclin ultérieur de ces activités

C. L’échec de la CED et ses conséquences

1°) Les faits

– Contexte dramatique et dangereux de la guerre froide d’où nécessité pour EUA et certains pays européens de renforcer la défense européenne.

– Traité de la C.E.D. (Communauté Européenne de Défense) signé 27 Mai 1952 par les 6 et ratifié par les parlements de nos cinq partenaires

– Echec cependant : la CED ne verra jamais le jour du fait du refus français de ratifier le traité en 1954

  • Triple opposition

• Des gaullistes par souci d’indépendance nationale,

• Du PCF qui considère que le traité est une arme contre l’URSS,

• Des germanophobes inquiets de la renaissance éventuelle du militarisme allemand et arc-boutés sur la démilitarisation de ce pays

  • La moitié des socialistes et des radicaux, très partagés sur cette question fait basculer le vote ; le clivage passe à l’intérieur de ces partis.

Remarque

• La remilitarisation de l’Allemagne se fera néanmoins, dans le cadre de l’OTAN et par la volonté américaine …

• Faute d’une solution vraiment européenne, c’est donc la solution atlantiste qui l’emporte.

2°) Les conséquences

– Echec lourd de conséquences : une Europe militaire aurait rapidement entraîné la constitution d’une Europe politique pour prendre les décisions stratégiques. Ce ne sera pas le cas et aujourd’hui encore on peut en mesurer les conséquences car une véritable politique extérieure et de défense européennes font toujours défaut aujourd’hui.

– Du fait de l’échec, la construction européenne va prendre une direction économique qui va réussir, mais aujourd’hui  l’Europe politique est toujours davantage une perspective qu’une réalité !…

 

II. LA CEE : PROGRES ET DIFFICULTES DE LA CONSTRUCTION EUROPEENNE DE 1957 A 1989.

Après l’échec de la CED, les dirigeants européens vont malgré tout poursuivre leur action avec la volonté de relancer le processus de la construction européenne.

Le contexte est plutôt favorable à de nouvelles initiatives :

• La violente répression soviétique en Hongrie à l’automne 56 ravive la peur du communisme

• La crise de Suez met cruellement en lumière la faiblesse des pays européens face aux deux supergrands.

• Le gouvernement socialiste de Guy Mollet est en France favorable à l’Europe, tandis que l’opposition sociale-démocrate allemande s’y rallie.

Quelle Europe construire ?

• Une Europe fédérale, véritablement supranationale, avec un exécutif fort, une économie et une défense intégrée ? (« unionistes »

• Une Europe confédérale, laissant une large autonomie aux Etats et coiffée par un gouvernement fédéral aux pouvoirs bien délimités ?

• Une Europe des Etats, simple association de coopération entre Etats indépendants ?

 

A. LA MISE EN PLACE DE LA CEE.

1°) Le traité de Rome

– Signature par les six le 25 Mars 1957

– Entrée en vigueur le 01 Janvier 1958

a) Création de la CEE, communauté économique européenne.

– Priorité aux objectifs économiques sur les objectifs politiques

– Affirmation des solidarités de fait dans de MARCHE COMMUN

– Objectif = UNION DOUANIERE (réalisée le 01/07/1968) en vue de la libre circulation des hommes, des marchandises et des capitaux, avec en outre un tarif extérieur commun (à + long terme : Union économique et possibilité d’unification politique)

b) Création du C.E.E.A. ou EURATOM

– Commissariat européen à l’énergie atomique

– Objectif : développement de la filière nucléaire en Europe pour limiter la dépendance extérieure sur le pétrole, mais aussi la dépendance technologique à l’égard des Etats-Unis concernant les centrales nucléaires.

– Avenir : fusion en 1967 de la CEE, de la CECA et d’EURATOM

c) Mise en place d’institutions communautaires

– Souveraineté des Etats garantie par le fait que les décisions concernant la communauté doivent être prise selon la règle de l’unanimité (règle obtenue par De Gaulle en 1965

 

2°) L’isolement britannique et son évolution

a) le RU refuse de participer à la CEE

– Une certaine tradition de magnifique isolement

– Des liens bien plus privilégiés avec les EUA et le Commonwealth dont elle ne veut pas se couper (relent de tradition impériale)

– Scepticisme sur les chances de succès de la CEE

– Refus d’envisager autre chose qu’une union strictement douanière (or l’objectif d’union économique figure dans le traité)

b) le RU à l’origine de l’A.E.L.E.

– Association  européenne de libre échange

– GB + Autriche, Suisse, Danemark, Norvège, Suède, Portugal et Islande

– Il s’agit de court-circuiter la CEE, de créer une concurrence à celle-ci pour la vaincre à terme et la faire disparaître

c) Le  revirement ultérieur de la GB

1. Les causes du revirement

– Relatif relâchement des liens avec les EUA

– Résultats médiocres de l’AELE

– Réussite de la CEE (développement spectaculaire et très stimulant des échanges)

2. Les demandes d’adhésion

– Double refus de la France de De Gaulle qui oppose son veto : 1963 & 1967

  • De Gaulle souhaite une France indépendante dans une Europe indépendante et il est donc hostile à l’atlantisme. Intégrer le RU à l’Europe, c’est en fait y faire entrer un cheval de Troie américain
  • Il estime que le RU regarde beaucoup plus vers l’outre-mer du fait de son attachement au Commonwealth que vers l’Europe continentale

– L’accord de Pompidou couronnera de succès la demande britannique en 1973

 

3°) Les autres crises politiques européennes sont liées aux affirmations nationales

a) Les blocages générés par la France gaullienne dans les années 60

– Le général De Gaulle, soucieux de l’indépendance nationale,  défend l’idée d’une Europe des Etats et s’oppose à une Europe supranationale. Il préfère un renforcement du lien franco-allemand.

– Il pratique la politique de la chaise vide en 1965 pour protester contre le renforcement de la supranationalité. Le compromis de Luxembourg met fin à la crise en affirmant la nécessité de l’unanimité des états membres pour les votes importants.

b) Les blocages engendrés par le RU de Mme Thatcher au début des années 80

– Margareth Thatcher accède au pouvoir en 1979

– Elle critique vigoureusement l’intégration économique et monétaire, demande et obtient une réduction de la contribution britannique au budget communautaire. : « I want ma money back ! »

– On parle alors d’euroscepticisme et d’europessimisme

 

B. ELARGISSEMENT ET APPROFONDISSEMENT DE LA CONSTRUCTION EUROPEENNE

La CEE enregistre dans les années 60 une croissance économique élevée de telle sorte que d’autres pays sont incités à demander leur adhésion. L’Europe est donc amenée à s’élargir à plusieurs reprises.

Le projet européen  progresse lui aussi et s’approfondit progressivement à de nouveaux domaines de compétence par transfert des états vers les institutions communautaires.

• Les institutions s’améliorent

• Les politiques communes se multiplient

 

1°) Le renforcement des institutions européennes

– La communauté européenne dispose d’institutions qui reposent sur des délégations de souveraineté consenties par les Etats qui la composent

– Ces institutions représentent à la fois les intérêts nationaux et les intérêts communautaires

– Elles évoluent et  se perfectionnent progressivement, avec quatre organes essentiels.

a) Le Conseil européen

– Créé en 1974

– Réunion des chefs d’état ou de gouvernement européens avec le président de la Commission

– Pouvoir décisionnel : il définit les grandes orientations, les objectifs prioritaires, donne les grandes impulsions

– 2 réunions/an au minimum, préparées par le pays qui occupe la présidence (tournante) de l’Union pour six mois.

b) Le Conseil des ministres

– Représente les intérêts de chacun des pays membres pour chaque domaine concerné

– Un ministre par état membre et par thème

1. Le véritable pouvoir de décision de l’UE

– Il met en place les orientations des politiques communes par des actes législatifs en accord avec le parlement européen (codécision), par l’intermédiaire d’actes législatifs, directives et règlements

2. Deux leviers exécutifs

– La directive  adoptée en co décision par les ministres et les parlementaires européens, qui nécessite une transposition dans le cadre juridique national et laisse donc une marge de manoeuvre aux Etats quant à la forme et aux moyens pour la mettre en oeuvre.

– Le règlement, directement applicable dès qu’il a été adopté par le Conseil des ministres et publié au Journal Officiel des Communautés européennes, qui fixe une règle, impose des obligations ou accorde des droits à tous les Etats dans des domaines précis

c) La Commission

– Siège à Bruxelles, rouage essentiel de la communauté

– 25 membres à compter du 1.11.2004, un par pays

– Sorte de gouvernement supranational agissant de manière collégiale et dans l’indépendance à l’égard des gouvernements nationaux, avec un engagement des commissaires à agir de façon indépendante de leur pays d’origine.

– Le Président de la Commission coordonne son action

– Des prérogatives importantes

  • Pouvoir exécutif (mise en application des décisions du conseil des ministres)
  • Pouvoir de proposition de mesures ou d’actions (« propositions de directives ») au conseil des ministres : elle a le monopole de l’initiative législative.
  • Pouvoir de représentation auprès de pays tiers ou organisations internationales
  • Gardienne des traités
  • Gestion du budget communautaire
  • Possibilité de sanctionner un pays ne respectant pas ce qu’elle a édicté

d) Le Parlement

– Caractères

  • Elu  au suffrage universel depuis 1979 pour 5 ans dans chaque pays :

• Sa légitimité devient alors incontestable et cela lui permet de prétendre obtenir de nouveaux pouvoirs

• A l’origine il ne disposait d’aucun pouvoir réel (son premier président fut Simone Veil, ancienne ministre française de la santé)

• 732 députés élus en 2004

  • Les Elus se regroupent en groupes parlementaires selon les affinités politiques et non pas selon les critères de nationalité.
  • Siège : Strasbourg avec une session plénière une fois par mois,

• Mais secrétariat du Parlement à Luxembourg

• Et travail en commission et réunions de groupes à Bruxelles…

– Extension des pouvoirs du Parlement en 1986 dans les domaines législatif et budgétaire

 

2°) Les élargissements successifs

a) De l’Europe des 6 à l’Europe des 12

– La réussite de la CEE avec l’accroissement des échanges et le développement économique incite d’autres pays européens à se joindre aux six.

– Plus nombreuse, l’Europe devient aussi plus forte, malgré les problèmes rencontrés.

1. L’intégration des nouveaux membres
  • 1973 : entrée RU + Danemark + Irlande   Europe des 9
  • 1981 : entrée de la Grèce         Europe des 10
  • 1986 : entrée de l’Espagne et du Portugal   Europe des 12

Remarque :

l’Espagne, le Portugal et la Grèce n’ont pu entrer dans la CEE qu’une fois débarrassés de leur dictature et après affermissement de la démocratie car un régime démocratique est une condition à l’entrée dans la communauté européenne.

L’entrée de l’Espagne a suscité une forte contestation des agriculteurs français craignant la concurrence espagnole

2. Un renforcement de l’Europe mais de nouveaux problèmes à résoudre

– L’arrivée de Margaret Thatcher au pouvoir en GB en 1979 renforce l’euroscepticisme.

  • le RU est hostile à l’intégration économique et monétaire et ne souhaite pas davantage d’Europe sociale. Elle constitue un frein à l’approfondissement.
  • le RU demande et obtient une réduction de sa contribution au budget communautaire ( « I want my money back »)

– L’intégration des pays méditerranéens contribue à la stabilisation et au développement économique de l’Europe méditerranéenne. Les fortes disparités économiques N/S seront progressivement résorbées par le renforcement de la politique régionale commune.

b) La réunification allemande

– En 1989, les démocraties populaires s’émancipent de la tutelle politique soviétique et en l’espace de deux ans, c’est le communisme qui s’effondre avec la disparition de l’URSS, la dissolution du CAEM et du Pacte de Varsovie

1. La chute du communisme en RDA
  • La migration de centaines de milliers d’Allemands de la RDA vers la RFA à partir de mai 89,  : véritable exode massif des allemands de l’Est vers l’Ouest via la Hongrie et l’Autriche (la Hongrie de Kadar  a ouvert la première brèche dans le rideau de fer sur sa frontière avec l’Autriche et les Allemands de l’Est s’y précipitent
  • Multiplication des manifestations de masse en RDA
  • Octobre 1989 : Erich Honecker, abandonné par Gorbatchev,  est contraint à la démission
  • Elections en RDA en mars 90 : débâcle du PC et large victoire de l’Union Chrétienne de Lothar de Maizière
  • Le chancelier Helmut Kohl accélère le processus et supervise la réunification avec une grande diplomatie
  • Juillet 90 : Union monétaire entre RFA et RDA  et l’URSS accepte l’entrée d’une Allemagne unifiée dans l’OTAN (contre 12 milliards de DM pour financer le retrait de ses troupes)
  • 3 Octobre 90 : absorption de la RDA par la RFA avec reconnaissance de la frontière 0der-Neisse ; Berlin redevient la capitale d’une Allemagne qui retrouve sa pleine souveraineté
2. La chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989 ouvre la voie à vers la réunification allemande
3. Un processus en deux temps :

• L’unité  allemande est retrouvée, avec l’accord de Gorbatchev et sous l’impulsion d’ H. Kohl,  et avec 80 millions d’habitants pèse d’un poids plus lourd dans l’Union. Le poids politique de l’Allemagne en Europe s’en trouve aussi renforcé.

• Dans les faits, la réunification est difficile et coûteuse ; elle entraîne aussi quelques désillusions dans les nouveaux länder : effondrement industriel, montée du chômage

 

3°) Des politiques communes renforcent le processus d’unification

a) La PAC : Politique agricole commune (1962)

1. Objectifs de départ
  • Augmenter la productivité et par là même, la production agricole
  • Garantir  aux consommateurs la sécurité et la régularité d’approvisionnement en denrées alimentaires à des prix raisonnables
  • Stabiliser les marchés agricoles
  • Assurer aux agriculteurs un niveau de vie équitable à parité avec les autres catégories socioprofessionnelles
  • L’unité du marché
2. Principes et mécanismes de fonctionnement

• libre circulation des produits dès 1968,

• un prix unique européen pour chaque produit, chaque année

  • La préférence communautaire

• Objectif : favoriser le commerce agro-alimentaire intra européen

• Toute importation de l’extérieur de la CEE à un prix inférieur à celui de la CEE est taxée par des droits de douane alimentant le budget communautaire

  • La solidarité financière

• au travers d’un budget commun

• avec le prix minimum garanti aux agriculteurs

• avec des aides ou subventions à l’exportation

• avec le stockage, la destruction ou l’écoulement à perte des productions excédentaires par la CEE (ce qui permet de garantir les prix)

• avec le FEOGA, Fonds Européen d’Orientation et de Garantie Agricole, créé en 1962, structure de gestion de la PAC, financée par les états membres et gérée par la commission de Bruxelles

3. Réussites et limites :
3.1. Un remarquable succès initial
  • La PAC a tenu ses objectifs, permis la modernisation de l’agriculture, l’augmentation de la production et celle des exportations tout en préservant le revenu des agriculteurs
  • Elle fut en quelque sorte victime de son succès, avec à la clé des surproductions d’un coût prohibitif : la PAC engendre un gouffre financier (la PAC absorbe la moitié du budget européen)
  • Pour y palier : plusieurs réformes successives
3.2. Difficultés et problèmes

b) Le SME, Système monétaire européen, et l’ECU

• Mise en place au 01.01.1979 (décision 78) sur une initiative du Président Giscard d’Estaing

1. Objectif :
  • Créer une zone de stabilité monétaire en Europe dans un monde en plein désordre depuis l’effondrement du SMI consécutif à la crise du $ et, pour ce faire, limiter les fluctuations monétaires et stabiliser les taux de change entre les monnaies nationales.
  • Eviter les perturbations dans le commerce intra européen et au contraire le faciliter par ce biais
2. Moyens :

– Création d’une unité de compte européenne commune aux membres : l’ECU (European Currency Unit)

  • Panier de devises dont la valeur est calculée chaque jour en fonction de celle de chacune des 12 monnaies entrant dans sa composition (la part la plus grande revenant au mark)
  • Devise étrangère dans chacun des pays européens, donc d’un EUAge limité et assorti de frais de transaction

– Le «Serpent monétaire » :

  • Maintien des fluctuations des valeurs des principales monnaies européennes les unes vis à vis des autres à l’intérieur de limites étroites (± 2,25 % par rapport à leur valeur pivot), avec
  • Des remises à jour périodiques du fait des différentiels d’inflation en Europe et des vagues spéculatives.
  • La spéculation internationale peut encore jouer une monnaie européenne contre une autre et déstabiliser l’Europe
  • Une monnaie unique ne le permettra plus, mais la monnaie commune demeure une étape importante.
  • L’Acte Unique européen, signé à Luxembourg en 1985 constitue une relance de l’idée européenne.
  • Les objectifs sont définis à l’horizon 1993.
3. Une réussite et un tremplin  vers la monnaie unique

c) La CEE : espace de libre circulation

1 « L’Acte unique de 1985 » : Du marché commun au marché unique :

• Réalisation d’un « grand marché intérieur » : espace sans frontières, transcendant la notion de marché commun avec une totale liberté de circulation  et la suppression des barrières non tarifaires (normes, fiscalité, législations) : il s’agit de mettre en place un « marché unique » de 370 millions d’habitants, tâche considérable compte tenu de l’harmonisation nécessaire et de nombreuses entraves à supprimer.

• Harmonisation fiscale

• Harmonisation des politiques sociales : la Communauté pourra légiférer en matière sociale pour améliorer les conditions de travail

• Coordination des efforts de recherche + développement technologique

2  Les accords de Schengen en 1985
  • Regroupent  d’abord 7 états puis 12 pays de l’UE, c’est à dire les 15 sauf le Danemark, le RU et l’Irlande.
  • Mise en place en 1995

• Suppression progressive des contrôles aux frontières intérieures pour les citoyens de l’UE

• Renforcement des contrôles sur les frontières extérieures de l’espace Schengen

• Harmonisation des règles d’immigration pour unifier la politique à l’égard des ressortissants étrangers.

• Collaboration plus étroite entre les services de douane et surtout de police et de justice pour lutter plus efficacement contre les trafics illicites et les mafias internationales

3. Le programme « Erasmus »
  • 1987
  • Favorise la circulation des étudiants des états membres d’un pays à l’autre
  • Fondé en 1975
  • 2ème budget de la CEE (un tiers des dépenses)
  • Une véritable politique régionale avec différents programmes d’aide aux régions en difficulté ou en crise financés par les fonds structurels
    • Les écarts de développement se sont réduits entre le nord et le sud de l’Europe, et les régions de l’Europe méditerranéenne ont connu une croissance et un développement importants, en partie grâce à  la solidarité européenne
    • La politique d’aménagement du territoire se réalise de plus en plus à l’échelle européenne et de moins en moins à l’échelle des états.
    • En matière de recherche scientifique
    • En matière de coopération technologique (programme Eurêka)
    • En matière de pêche et de protection des fonds marins
    • En matière de protection de l’environnement

d) La CEE, un espace solidaire pour limiter les disparités régionales

1. Une structure appropriée : le FEDER (fonds européen de développement régional)
2. Des réussites incontestables

e) Différents programmes européens dans des domaines variés

 

4°) L’ouverture sur l’extérieur : coopération avec le Tiers-monde

• Accords de Yaoundé 1964 entre les 6 et l’Afrique francophone

• Accords de Lomé

  • Plusieurs accords successifs : Lomé I (1975-80), Lomé II (1980-85), Lomé III (1985-90), Lomé IV (1990-2000)
  • Plus de 200 millions d’hommes et 70 pays concernés
  • Contenu :

• Libre accès des produits ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique) dans l’UE sans obligation de réciprocité

• Plan de stabilisation des recettes d’exportation des pays ACP de produits agro-alimentaires et miniers pour lutter contre la variabilité des cours mondiaux, donc des recettes  des pays exportateurs concernés

• Aides diverses à l’investissement sous la forme de subventions et de prêts

• Aide alimentaire et assistance technique

Au total, l’UE est le premier partenaire commercial des pays en développement

  • L’UE absorbe 21.5 % de leurs exportations
  • Elle contribue à 36 % de l’aide publique (dont les 2/3 vers l’Afrique subsaharienne)

III. L’UNION EUROPENNE FACE AUX DEFIS DU MONDE CONTEMPORAIN : 1991-2004

La fin des démocraties populaires en 1989 et la disparition de l’URSS modifient profondément la donne géopolitique en Europe. La fin de la guerre froide introduit l’instabilité en Europe : les états fédéraux explosent et se dissocient, 17 nouveaux états voient le jour, la guerre réapparaît sur le continent dans l’ex-Yougoslavie, et un nouvel équilibre est donc à trouver, mais en même temps cette évolution spectaculaire suscite un grand espoir.

Initialement conçue pour faire face au bloc soviétique et devenue une puissance commerciale, la CEE puis l’UE sont confrontées au défi et à l’enjeu de la réunification du continent européen. Désormais la construction européenne peut se réaliser à l’échelle du continent, mais comment concilier approfondissement et élargissement et les mener de front ?

 

 A. L’APRES GUERRE FROIDE : UN CONTEXTE INTERNATIONAL NOUVEAU.

• Une espérance avec l’Europe qui se réunifie.

• De nouvelles difficultés, dans les PECO où la sortie du communisme s’avère très difficile, et en Yougoslavie qui s’entredéchire dans une guerre qui révèle l’impuissance de l’Europe au plan diplomatique et militaire.

 

1°) La réunification de l’Europe

La fin de la guerre froide et de la division idéologique permet à l’Europe de retrouver son unité géographique et historique, de « l’Atlantique à l’Oural » comme le disait déjà De Gaulle en son temps.

Le Conseil de l’Europe qui défend le modèle européen depuis sa fondation en 1949 accueille 23 nouveaux membres  entre 1989 et 2002

La CSCE réunie en 1990 à Paris célèbre la naissance d’une nouvelle Europe

L’OTAN propose un « Partenariat pour la paix » aux anciens membres du pacte de Varsovie et intègre trois nouveaux membres en 1999 et 2004.

  • La mission initiale de l’OTAN ne se justifie plus du fait de la disparition du bloc de l’Est qui fut à l’origine sa raison d’être
  • La structure se maintient pour faire face aux nouvelles menaces qui se profilent et aux nouveaux foyers d’insécurité

• Terrorisme international

• Montée des nationalismes en Europe

10 PECO se portent bientôt candidats à l’entrée dans l’UE

 

2°) A l’Est, une douloureuse transition à l’économie de marché

1989 : les PECO s’émancipent de la tutelle soviétique mais la sortie du communisme est difficile

a) Au plan politique :

– L’arrivée au pouvoir de nouveaux dirigeants ne résout pas automatiquement les problèmes lourds que connaissent ces pays, d’où des désillusions pour la population…

– Les anciens cadres communistes et leurs réseaux restent très influents. Ils sont les mieux placés pour assurer la transition mais pas nécessairement les plus compétents…

b) Au plan économique

– Un héritage très lourd : produits inadaptés au marché, de qualité médiocre, dépassés, industries vieillies, productivité et  rentabilité très insuffisante,

– Manque de capitaux nationaux

– Pas de culture libérale et aucune expérience en matière de gestion d’entreprises

– Forte pénétration de capital étranger, ouest-européen et mise à niveau brutale de l’appareil de production

– Conséquence :

  • Nombreuses faillites et fermetures d’usines
  • Augmentation du chômage et inflation avec paupérisation dans un premier temps.
  • Il faut attendre plusieurs années avant que les économies ne se redressent et ne deviennent véritablement attractives
  • Etat fondé en 1918 pour rassembler les Slaves du Sud
  • Un état fédéral depuis 46, constitué de six républiques et deux régions autonomes, dont la cohésion est assurée par la  poigne de son leader charismatique Tito et par la dictature communiste qui empêche toute opposition de s’exprimer.
  • Cet état ne va pas survivre à la mort de Tito en 1980 et à l’effondrement du communisme en 1989, ses deux seuls ciments.
  • Slovènes et Croates = Slaves catholiques dont le passé est celui de l’Empire Austro-hongrois jusqu’en 1918
  • Serbes, Monténégrins et Macédoniens sont des Slaves orthodoxes dont l’histoire est celle de la lutte contre l’occupant ottoman
  • Les Musulmans = populations slaves de Bosnie ayant adopté l’Islam au temps de l’Empire ottoman
  • Les Hongrois de Voïvodine et les Albanais du Kosovo, Musulmans pour la plupart, se trouvent dans deux régions autonomes.

3°) Le drame yougoslave.

a) Un état multinational

1. L’état de Yougoslavie :
2. Ses composantes :

b) La guerre en Yougoslavie et l’affrontement des nationalismes

1. L’éclatement du pays

– 1991 : La Croatie proclame son indépendance suite au referendum de mai.

– 1992 : La Bosnie proclame son indépendance suite au referendum où les musulmans et les croates ont voté mais que les Serbes de Bosnie ont boycotté

– La Serbie entend protéger les Serbes de Croatie et de Bosnie

2. La guerre en Bosnie débute en Avril 92
2.1. Le retour de la guerre en Europe
  • La Serbie, dirigée par Slobodan Milosevic, ancien communiste et ultra nationaliste, entend construire une « Grande Serbie »
  • La Bosnie va connaître une guerre de trois ans dont sont surtout victimes Croates et Musulmans
  • Des violences et des scènes d’horreur : bombardements de populations civiles comme à Dubrovnik ou a Sarajevo, villes martyres, camps de concentration, « purification ethnique »
  • L’UE divisée s’avère incapable d’apporter une solution à ce problème européen… Aucune diplomatie commune
  • L’ONU envoie des Casques Bleus sur place mais ne parvient pas à éviter les massacres
  • C’est finalement l’OTAN qui intervient en 1994 et ce sont donc les EUA qui vont le régler militairement et diplomatiquement :
2.2. Une solution bien difficile

• Bombardement des positions serbes par l’aviation

• Accords de Dayton (aux EUA…) en décembre 95 : la Bosnie reste dans ses frontières de 92 mais elle est composée de deux entités distinctes : l’une serbe, (la République Serbe de Bosnie) l’autre croate et musulmane (La fédération Croato-musulmane de Bosnie)

3. La guerre du Kosovo
  • En 1997, nouvelle guerre balkanique au Kosovo : répression de l’armée serbe contre la population albano-musulmane qui veut l’indépendance
  • Nouvel échec de la diplomatie européenne
  • Nouvelle intervention de l’OTAN sous initiative américaine en 1999 avec bombardements sur Belgrade pour contraindre l’armée serbe à se retirer du Kosovo où elle pratiquait de nombreuses exactions.
  • Le Kosovo est placé sous administration de l’ONU.

Aujourd’hui :

Les troupes de l’OTAN et de l’ONU (FORPRONU) sont toujours présentes sur place.

Milosevic est battu aux présidentielles de 2000, arrêté en 2001, transféré au Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie pour y être jugé pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

 

B. la mise en place de « L’UNION EUROPEENNE »

1°) Le traité de Maastricht (1991) et ses prolongements

• Signé par les chefs d’état des 12  en Décembre 1991,

• Il institue « l’Union Européenne » qui remplace la CEE, modifie et complète les traités de Rome de la CECA et de la CEEA, intègre les réalisations antérieures de la CEE telles que l’Acte Unique.

• Entrée en vigueur en Novembre 93, après une ratification parfois difficile (les Français ne l’adoptent qu’à une faible majorité 51 % de oui au référendum de septembre 92)

a) Le volet économique : L’UEM[1]

1. Mise en place d’une monnaie unique : l’Euro
  • Mise en circulation au 1er janvier 2002 (et disparition des monnaies nationales au 1er juillet 2002) dans les 12 pays de la zone euro.
  • Réussite remarquable
  • Le RU, le Danemark et la Suède restent réfractaires à la monnaie unique, s’en tiennent à l’écart et conservent leur monnaie nationale.
2. Les Instruments de la politique monétaire européenne
2.1. Instauration d’un Système Européen de Banques Centrales (SEBC)

– Création de la Banque Centrale Européenne en 1997

  • Siège est à Francfort
  • Indépendante, elle coiffe toutes les banques centrales nationales
  • 12 membres, un par pays
  • Présidence : Wim Duisenberg  puis Jean-Claude Trichet
  • Missions

• Déterminer la politique monétaire

• Contrôler l’émission de la monnaie

• Assurer la stabilité de la monnaie

2.2. Le Pacte de stabilité et de croissance
  • Adoption par le Conseil européen d’Amsterdam en juin 1997.
  • Objectif

• Assurer la gestion saine des finances publiques dans la zone euro en prévenant l’apparition d’un déficit budgétaire excessif dans un pays membre (seuil à ne pas dépasser 3% de déficit annuel)

• Assurer ainsi la convergence soutenue et durable des économies des États membres de la zone euro pour maintenir la confiance dans la stabilité économique de cette zone.

b) Le volet politique

1. L’instauration de la citoyenneté européenne

– double nationalité désormais pour les européens, la nationalité du pays membre et la nationalité européenne.

– droit de vote et éligibilité aux élections municipales pour tout européen résidant dans un état membre dont il n’est pas ressortissant.

2. L’extension des prérogatives européennes

– 17 domaines sont communautarisés et ne relèvent donc plus de la seule compétence des états ni de la simple coopération intergouvernementale :

– Ils sont désormais gérés par la communauté de l’ensemble des états membres par l’intermédiaire de politiques communes.

3. L’affirmation du principe de subsidiarité
  • Vieux principe de philosophie politique qui veut que le « niveau supérieur » n’intervienne que dans la mesure où le « niveau inférieur » n’est pas à même de le faire plus efficacement.
  • Rapporté à la CE, il tend à éviter des interventions excessives de la commission de Bruxelles dans le champ des responsabilités nationales.
  • De très modestes progrès et un rôle très secondaire sur la scène internationale :
4. La PESC[2] : une simple perspective
2.1. En matière de politique étrangère commune

• Mener des actions communes, décidées à l’unanimité des membres dans un premier temps.

• Décider à l’unanimité comment parvenir à des décisions que l’on puisse prendre à la majorité qualifiée

  • Dans les faits : incapacité flagrante à parler d’une seule voix et impuissance à intervenir avec efficacité sur la scène internationale

• Cf. problème yougoslave, finalement solutionné par les EUA

• Cf. division à propos de l’intervention américaine en Irak

3.1. En matière de défense commune
  • Ce projet s’inscrira dans le cadre de l’UEO, Union de l’Europe Occidentale, et vise à mettre en œuvre  des mesures de prévention des conflits et de gestion des crises.
  • Pour l’instant il s’agit surtout d’une pétition de principes …Les avancées sont plutôt embryonnaires et symboliques.

L’UE montre ici l’une de ses limites.

c) Le volet social

  • Appliquer la Charte Sociale de Strasbourg de 1989, restée lettre morte …
  • Quelques extensions de compétences de  l’UE dans le domaine social
  • Refus du Royaume-Uni de s’y associer
  • L’Europe sociale est en réalité toujours en panne …

L’UE montre ici une autre de ses limites.

2°) Le traité d’Amsterdam en 1997.

– Conclu en Juin 1997, il entre en application en 1999 après ratification

– Renforcement des droits du citoyen européen (y compris les droits sociaux) avec la mise en place d’un espace de « liberté, de sécurité et de justice »

– Elargissement des domaines ou le conseil des ministres peut prendre des décisions à la majorité qualifiée

– Augmentation des pouvoirs du Parlement européen :

  • Principe de codécision : dans plusieurs domaines l’accord entre les ministres des 15 et les députés européens est nécessaire à l’adoption d’une décision
  • Approbation de la nomination du président de la commission
  • Vote l’investiture de toute nouvelle commission

– Intégration de la Convention de Schengen dans le traité

– La politique d’immigration, de visas et d’asile politique devient une politique commune et la coopération policière et judiciaire entre les états est renforcée

– Des « procédures de coopération renforcée » sont possibles pour les Etats qui souhaitent avancer plus vite sur la voie de l’intégration

 

C. L’ELARGISSEMENT DE L’UNION EUROPEENNE ET SES PERSPECTIVES.

1°) Quelle Europe pour demain ?

a) Les faiblesses de l’UE : autant de défis à relever

1. Le déficit démocratique
1.1. Des institutions distantes, hors du contrôle des peuples et des citoyens
  • Malgré l’institution de la citoyenneté européenne, l’Europe souffre de la manière dont elle a été édifiée jusqu’alors : sans réelle consultation des peuples, sans réelle sensibilisation, sans véritable débat démocratique qui puisse être mobilisateur, essentiellement par des responsables et des spécialistes.
  • Un pouvoir exécutif qui reste dominant et dispose même désormais d’un champ d’intervention étendu alors que l’assemblée européenne est encore loin de disposer des prérogatives d’une véritable assemblée.
  • Les organes de décision restent aux mains de personnes non élues, donc irresponsables,

• La commission européenne, à l’origine de la plupart des directives et règlements, n’est pas élue et ne rend de comptes à personne.

• La commission européenne prête ainsi le flanc aux critiques de technocratie, de bureaucratie ou d’eurocratie.

1.2. La lourdeur technocratique avec la multiplication des procédures et des textes
  • Multiplication des normes communes aux pays européens (normes techniques, normes de sécurité etc..)
  • Les problèmes de langues rajoutent à la lourdeur générale : tous les textes européens rédigés dans les deux langues officielle, l’anglais et le français, doivent être traduits dans chaque droit national.
  • Chaque texte européen doit être adopté par les Parlements nationaux (85 % environ des lois votées par le parlement français proviennent de la législation communautaire)
  • Il n’est pas une profession, une industrie ou un marché qui n’ait pas de représentants faisant tout pour se faire entendre à la Commission ou au Parlement et exercer ainsi une influence sur les décisions
  • Travaux et enquêtes réalisés par de nombreux organismes et bureaux extérieurs à l’administration européenne du fait de la sous-traitance généralisée rendue nécessaire par le petit nombre de fonctionnaires européens (La Commission compte seulement 20 000 fonctionnaires, ce qui est moins que la seule ville de Paris) ; cela a pu favoriser le copinage voire la fraude.
  • Au vu des bien modestes avancées dans ce domaine, notamment  dans le domaine de l’emploi, quasiment ignoré et pourtant si préoccupant.
  • Différentes résolutions adoptées et beaucoup de déclarations d’intentions
  • Une Charte Sociale des droits sociaux fondamentaux qui remonte au 9 décembre 1989 mais qui n’a toujours aucun statut officiel dans l’UE …
1.3. Le manque de transparence et le poids des « lobbies ».
2. Le déficit social

1- Le droit à la libre circulation, pour pouvoir exercer toute profession dans le pays de la Communauté européenne de son choix, dans les mêmes conditions que les ressortissants du pays d’accueil
2- Le droit à l’emploi et à une rémunération équitable
3- Le droit à l’amélioration des conditions de vie et de travail
4- Le droit à la protection sociale
5- Le droit à la liberté d’association et à la négociation collective
6- Le droit à la formation professionnelle
7- Le droit à l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes
8- Le droit à l’information, à la consultation et à la participation des travailleurs
9- Le droit à la protection de la santé et de la sécurité dans le milieu de travail
10- Le droit à la protection des enfants et des adolescents
11- Le droit à un revenu minimal pour les personnes âgées
12- Le droit à l’intégration et à la réadaptation professionnelles et sociales pour les personnes handicapées

  • Peu de réalisations concrètes : aucune lutte cohérente contre le chômage, mise à part l’affirmation du credo libéral (le retour à la croissance économique dans un cadre libéral devrait engendrer la réduction du chômage sans qu’il soit besoin d’intervenir)
  • Opposition farouche du Royaume-Uni à toute politique sociale
3. Le déficit industriel

– Aucune grande politique industrielle, aucune perspective de collaboration ou de coopération accrue dans ce domaine, ni concernant de grands projets, ni à propos des délocalisations.

– C’est d’autant plus dommage que la coopération industrielle entre entreprises européennes a débouché sur des succès importants :

  • Airbus : créé en 1970, second avionneur au monde derrière Boeing, 40000 emplois en Europe
  • Ariane : 60 % du marché mondial du lancement des satellites
  • EADS[3] : nouvelle société résultant d’une importante fusion à l’échelle européenne (fusion du français Aérospatiale Matra et de l’allemand Daimler-Chrysler Aerospace avec ralliement de la société espagnole CASA). Le britannique Bae (British Aerospace) n’est plus le seul grand
4. Le déficit de puissance à l’extérieur : la difficile mise en œuvre d’une PESC

– Il est difficile de trouver un terrain d’entente entre les pays qui ont une tradition d’intervention dans les affaires du monde ( France, Allemagne, Grande-Bretagne) et les petits pays avant tout préoccupés par leur devenir intérieur et leur cadre de vie compte tenu de leur dimension ou de leur histoire.

– Au plan militaire :

  • l’UE n’a pas d’armée et s’appuie sur l’Alliance Atlantique et l’OTAN pour assurer sa défense.
  • L’Eurocorps est une force encore très réduite mais composée de militaires allemands, français, espagnols et belges.

• elle fut stationnée en Macédoine pendant la guerre du Kosovo

• elle dirige aujourd’hui la force d’interposition au Kosovo

– Au plan diplomatique,

  • Depuis Juin 1999 c’est l’espagnol Javier Solana, ex-secrétaire général de l’OTAN qui en est le premier haut représentant de la PESC
  • Il est ainsi devenu le porte-parole des quinze sur la scène internationale pour la politique extérieure de l’Union.
  • Désaccords nombreux et négociations parfois interminables

b) Quel projet pour l’avenir ?

– Au fur et à mesure ou les états abandonnent des parcelles de souveraineté, ils s’accrochent de plus en plus à ce qui leur reste et à leur identité nationale. Les égoïsmes nationaux restent vigoureux. Les intérêts nationaux divergents restent difficiles à concilier et à surmonter.

– Les divergences de vues restent fortes sur la nature de l’Europe qui est à construire ou à consolider :

  • Une simple zone de libre-échange ? C’est l’option des britanniques et des scandinaves
  • Une Europe des patries ou des Etats ? C’est l’option des souverainistes, et ce serait un retour en arrière
  • Une Europe confédérale ? C’est l’état actuel de l’UE, le traité établissant une constitution allant dans cette même direction
  • Une Europe fédérale ? C’est l’option des plus ambitieux, des Allemands notamment Faut-il alors dans ce cas élire un président de l’UE, avec quels pouvoirs ?
  • Faut-il envisager une Europe à plusieurs vitesses ou à plusieurs cercles ?
  • Quelles frontières pour l’UE ?

• La Bulgarie et la Roumanie devraient entrer dans l’UE en 2007

• Avec ou sans la Turquie ?

• La Croatie souhaite être candidate.

• Et les autres pays européens ?

– Le débat reste ouvert mais l’élargissement à 25 en 2004, à 27 en 2007 et le traité établissant une constitution européenne apportent de nombreux éléments de réponse à ces questions.

 

2°) Une nouvelle phase d’élargissement : 2004-2007

a) Le traité de Nice (février 2001) s’efforce de préparer l’élargissement

Un compromis est trouvé mais la réforme en profondeur du système est renvoyée à plus tard

Les principaux changements institutionnels dans la perspective de l’élargissement sont :

1. Un nouveau dosage entre pays à l’intérieur de la Communauté

– Pondération des voix au Conseil et redéfinition du nombre d’élus à l’Assemblée pour les  pays membres et les postulants (728 députés à terme)

2. L’extension de la majorité qualifiée aux dépends de la règle de l’unanimité
  • De nouveaux champs d’application
  • De nouvelles règles pour la prise de décision

• Le seuil de la majorité qualifiée passe de 71 à 75 % (232 voix / 321)

• Une majorité d’états doit être obtenue (ce qui donne un pouvoir de blocage aux petits états)

• Aucune décision ne peut être prise par des états représentant moins de 62 % de la population

  • Limitation du droit de veto qui subsiste cependant largement
    • Un régime démocratique respectueux des Droits de l’Homme
    • Une économie de marché ouverte à la concurrence
    • Accepter les acquis communautaires
    • Faire partie de l’Europe géographiquement et culturellement

b) L’élargissement de l’Union vers l’Est et la réunification de l’Europe :

1. Les conditions de l’élargissement
1.1. Les candidats doivent satisfaire à plusieurs critères, dits de Copenhague

• C’est pour ne pas satisfaire à tous ces principes que la candidature du Maroc a été refusée.

• Celle de la Turquie a été acceptée mais les négociations n’ont pas encore commencé.

1.2. Les nouveaux membres intégrés en 2004

• L’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Hongrie et la République Tchèque, la Slovaquie, la Slovénie, Malte, Chypre.

• L’UE compte donc 25 membres désormais.

• Une ratification par les peuples concernés à une très large majorité le plus souvent (80% de « oui » en Hongrie et en Slovénie, 90% de « oui » en Lituanie et Slovaquie)

1.3. Deux nouveaux membres en 2007 :

• La Roumanie

• La Bulgarie

2. Les conséquences de l’élargissement
2.1. Aspects positifs de l’élargissement
  • Une réponse positive à l’attente des PECO qui regardent vers l’Europe de l’Ouest depuis que le joug soviétique leur a été ôté.
  • Une zone de paix élargie sur le continent pour éviter la répétition de conflits comme ceux de l’ex-Yougoslavie
  • Une réunification de l’Europe, après la longue division de la guerre froide
  • Une extension du marché européen qui devrait stimuler la croissance économique pour tous (de 370 à 455 millions d’habitants)
  • Une place dans le monde renforcée notamment face aux EUA ou au sein de l’OMC
  • Le problème financier
2.2. De nouveaux problèmes à régler

• Les pays candidats, vu leur niveau de développement moindre sont des « bénéficiaires nets » potentiels du budget européen. Une nouvelle redistribution s’impose et les politiques actuelles de solidarité seront donc à revoir

• Le coût devrait s’élever à 75 milliards d’euros (488 milliards de francs environ), un « véritable plan Marshall pour les pays d’Europe centrale et orientale » disait Jacques Santer, ancien président de la Commission.

  • Le problème institutionnel

• Le problème institutionnel se trouve donc immédiatement posé puisque les institutions ont été conçues à 6 et pour 6,  fonctionnent non sans difficultés à 15, mais sont totalement inadaptées pour 25 ou 28 pays !

• Le traité signé par la CIG  en août 2004 doit être ratifié par les 25 pour entrer en vigueur

 

3°) La question institutionnelle

a) L’échec du traité établissant une constitution européenne

– Signature officielle du traité prévue le 29 octobre 2004 à Rome

– Echec du fait de la non ratification du traité par la France en mai 2005, puis par les Pays-Bas quelques semaines plus tard

b) Le traité de Lisbonne : 13 décembre 2007.

– Relance du processus européen pour doter l’UE d’institutions lui permettant de fonctionner à 27.

– Traité adopté qui ne pourra entrer en application qu’après ratification par les 27

– Traité ratifié puis entré en vigueur en décembre 2009

 


[1] UEM = Union Economique et Monétaire

[2] PESC = Politique Extérieure et de Sécurité Commune

[3] EADS =European Aeronautic, Defense and Space Company

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